top of page
Rechercher
David Boudeweel-Lefebvre

Budget du Québec 2022-2023

Une marge de manœuvre utilisée pour tenter de compenser l’inflation


Mise en contexte

Le 22 mars 2022, le ministre des Finances Éric Girard a présenté le Budget du Québec 2022-2023. Il s’agit du dernier exercice de la sorte avant le déclenchement des prochaines élections générales québécoises, prévues le 3 octobre prochain. En plus de l’échéance électorale, ce budget s’ancre dans deux réalités majeures : d’une part, la réouverture de l’économie québécoise en raison de la levée progressive de l’essentiel des mesures sanitaires. D’autres part, une hausse fulgurante du prix de plusieurs matières premières et du coût de la vie en général, en raison de l’invasion russe de l’Ukraine, et des sanctions en découlant.


Données financières

- Le PIB a progressé de 6,3% en 2021;

- Les dépenses gouvernementales pour 2022-2023 sont estimées à 136,6 milliards de dollars[1];

- Les revenus sont prévus à 138,5 milliards de dollars;

- Le déficit prévu pour 2022-2023 est de 6,5 milliards après un versement de 3,4 milliards au Fonds des Générations, qui est le fonds d'investissement de la province;

- L’équilibre budgétaire est toujours prévu pour l’exercice financier 2027-2028.


Prévisions économiques

Québec prévoit une croissance économique de 2,7% en 2022, puis de 2% en 2023. Le déficit structurel du Québec est pour sa part moins important que projeté à l’automne, à 2,8 milliards de dollars. L’écart de richesse entre le Québec et l’Ontario se resserre, passant de 16,4% à 13,6%. Le gouvernement prévoit ramener cet écart à 10% en 2026, avant de l’éliminer complètement en 2036.


Depuis 3 ans, la situation du Québec s’améliore face à la moyenne canadienne et ses principaux partenaires économiques de la fédération, dont l’Ontario.


Présentation globale

Le budget présenté aujourd’hui est fidèle aux grandes priorités déjà énoncées lors de la dernière mise à jour économique, à savoir la santé, l’éducation et l’économie. Il se veut également la réponse officielle du gouvernement du Québec à la hausse importante du coût de la vie observée ces derniers mois.


Lutte contre l’inflation

Le budget présenté aujourd’hui se veut la réponse officielle du gouvernement du Québec à la hausse importante de l’inflation, qui se situe maintenant à 4,5% au Québec. La mesure-phare est une aide financière ponctuelle de 500$ pour les citoyens gagnant moins de 100 000$ annuellement. Cette mesure devrait toucher jusqu’à 6,4 millions de Québécois. Il s’agit d’un crédit d’impôt applicable sur la déclaration d’impôts de 2021. Dans les faits, ceci augmentera le revenu disponible de plus de 90% des adultes québécois.


En matière d’habitation, une somme de 633,3 millions de dollars sur cinq ans est réservée afin de favoriser l’accès à un logement de qualité et abordable, notamment en aidant les ménages à faible revenu à payer leur loyer et en préservant les logements existants.


Économie

Le gouvernement prévoit une somme de 2,2 milliards de dollars sur cinq ans pour accroître la productivité de l’économie québécoise, notamment par le déploiement de la Stratégie québécoise de la recherche et de l’innovation (1,5 milliard), par la poursuite du virage numérique des entreprises (451 millions de dollars sur cinq ans) et en stimulant l’investissement dans les nouvelles technologies, dans l’entrepreneuriat et dans les exportations (224 millions).


Une somme de 290 millions de dollars est par ailleurs réservée à l’intégration en emploi des personnes immigrantes, notamment en augmentant l’appui offert pour l’apprentissage du français (198 millions de dollars), en favorisant l’Attraction des personnes immigrantes en région (80 millions de dollars) et en accélérant le traitement des demandes d’immigration (12 millions).


Une somme de 1,5 milliard de dollars sur cinq ans est également allouée pour favoriser le développement économique des régions. Au sein de cette somme, des investissements sont prévus pour soutenir le transport aérien régional, l’essor du secteur bioalimentaire, le développement du secteur forestier ainsi que pour la relance du secteur touristique.


Réseau de la santé

Une somme de 5,2 milliards de dollars sur cinq ans est prévue à cet égard, et servira principalement à financer le plan de refondation du réseau de la santé à venir du ministre Christian Dubé (1 milliard de dollars), à améliorer la gestion et la prestation du travail (3,4 milliards de dollars) et à moderniser le système de santé (789 millions de dollars). Une somme de 3,7 milliards de dollars sur cinq ans est également prévue pour rehausser les soins et les services à la population. Ces investissements se répartissent principalement par le renforcement des soins et services aux aînés et proches aidants (2,6 milliards), et à l’amélioration de l’accessibilité et de la qualité des services de santé et des services sociaux (546 millions).


Petite enfance, éducation et enseignement supérieur

Une somme totale de 2,8 milliards de dollars sur cinq ans est prévue dans ce secteur, principalement pour soutenir des initiatives en matière de réussite et de persévérance scolaire (1,6 milliard de dollars) et pour améliorer l’accessibilité aux études supérieures (1,2 milliard).


Taxes et impôts

Le budget présenté par Québec ne prévoit aucune augmentation d'impôt pour les particuliers et les sociétés. Le taux de taxation demeure également inchangé, y compris le taux de cotisation sur la masse salariale.


Également, aucune augmentation de taxes ou des frais liés à la vente d’alcool et de tabac n’est prévue, y compris en ce qui a trait au prix des permis de vente d’alcool.


Autres mesures

- Roulez Vert : le montant des rabais maximaux prévus au programme sont revus à la baisse, à 7000$ pour un véhicule électrique neuf et à 5 000$ pour une voiture hybride rechargeable neuve;

- Ajout d’un milliard au budget prévu pour lutter contre les changements climatiques. L’enveloppe totale atteint maintenant 7,6 milliards de dollars, dont 5,8 milliards sont destinés à la réduction des GES.


Analyse préliminaire

Malgré le contexte mondial mouvant, le Québec demeure en meilleure santé financière que la plupart des autres provinces du pays. Le budget présenté aujourd’hui contient relativement peu de surprises : il est axé sur les trois piliers identifiés par le gouvernement depuis son arrivée en poste, à savoir l’éducation, la santé et l’économie.

Conformément à ce qui avait été exprimé par le premier ministre et son ministre des Finances dans les jours précédant son dépôt, ce budget, sans qu’on puisse parler d’austérité, est somme toute assez prudent, particulièrement pour une année électorale, habituellement propice à des investissements plus généreux.

Pour compenser la hausse de l’inflation, le gouvernement a préféré proposer une mesure large, quasi universelle, plutôt que de segmenter son soutien auprès de certaines clientèles. Pour un budget électoral, il s’agit tout de même d’une mesure courageuse tandis que de nombreux groupes, représentants des intérêts particuliers, réclamaient davantage d’investissements plus spécifiques..


Si le gouvernement du Québec confirme une fois de plus le retour à l’équilibre budgétaire en 2027-2028, il omet toujours de détailler les moyens concrets qui seront pris pour atteindre cet objectif, préférant probablement reporter cette discussion après les prochaines élections automnales. Celui-ci s’engage toutefois à ne pas diminuer les services dans les missions fondamentales de l’État, ce qui est rendu possible par une relance post-COVID-19 plus dynamique que prévu.

Les mesures annoncées pour contrer la hausse du coût de la vie apparaissent intéressantes et devraient permettre de prévenir un ralentissement de la consommation à court terme. À long terme toutefois, il convient de rappeler que l’augmentation du revenu disponible des citoyens peut, au contraire, nourrir l’inflation. Des mesures plus structurelles, comme des réductions d’impôts pourraient aussi être envisagées dans les années futures.

Le budget demeure relativement timide en matière de lutte contre la pénurie de main-d’œuvre, qui continue de frapper plusieurs entreprises. Ceci est un des principaux reproches que l’on puisse faire. Nous aurions aimé des investissements supplémentaires dans l’immigration, la formation et la reconnaissance des équivalences de diplômes étrangers.

Merci de votre attention et au plaisir de continuer de discuter de ce budget qui, soyons-en certains, fera couler beaucoup d’encre.


À noter qu’en cas de disparité avec les documents officiels du gouvernement du Québec, ces derniers ont préséance.

[1] Les dépenses sont celles avant la prise en compte des mesures de soutien et de relance mises en œuvre pour lutter contre la COVID-19.

Comments


bottom of page